LES FAITS
Fondée en 2014, la société X est détenue par trois actionnaires : A (167 actions), B (167 actions) et C (166 actions). Suite à un conflit interne, B et C mandatent l’avocat Z pour défendre leurs intérêts. La même année, Z licencie A et lui retire son droit de vote au Conseil d’administration. Par cette action, Z agit au nom de la société sans mandat valide du Conseil d’administration, situation amenant l’actionnaire minoritaire à dénoncer l’existence d’un conflit d’intérêts.
In casu, les deux mandats de l’avocat provoquent-ils un conflit d’intérêts
à l’encontre de l’actionnaire minoritaire évincé ?
LE DROIT
En droit des sociétés, le nombre de parties et d’intérêts généralement en cause augmente le risque de conflit d’intérêts. Dernièrement, le Tribunal fédéral (TF) a proposé une solution à une situation fréquente pour les avocats, celle dans laquelle le même avocat représente la société et les actionnaires majoritaires.
Le TF reconnaît l’importance d’éviter les conflits d’intérêts conformément au principe de l’art. 12 let. cLLCA. Il rappelle l’interdiction de la double représentation illicite, à savoir l’impossibilité de représenter deux parties ayant des intérêts opposés. Cela peut déjà être le cas, dès lors que deux procédures distinctes présentent un lien matériel entre elles.
Dans le cas d’espèce, la plainte de A défend que les intérêts des actionnaires majoritaires divergent de ceux de la société, puisque son licenciement pourrait nuire à la société en compromettant de potentiels revenus futurs.
Toutefois, la simple possibilité théorique de conflits d’intérêts ne suffit pas pour conclure à une double représentation illicite. Il faut un risque concret découlant des circonstances spécifiques du cas. Or, l’avocat n’avait pas clairement enfreint les règles déontologiques au point de justifier une sanction à son encontre ou un retrait de son mandat.
La position de Z ne permet pas de relever automatiquement une situation de conflit d’intérêts car les intérêts de ces parties peuvent s’avérer convergents. Parfois, les intérêts de la société ne coïncident pas avec ceux des actionnaires. Cependant, cela ne permet pas d’affirmer l’existence concrète d’un conflitd’intérêts, mais seulement la possibilité théorique de l’apparition de situations d’intérêts contradictoires. Parconséquent, le Tribunal a maintenu les décisions des instances précédentes, qui avaient toutes refusé d’ouvrir une procédure disciplinaire contre Z.
Bien que la plainte ait soulevé des questions importantes, elle n’a pas réussi à démontrer une violation claire et manifeste des règles professionnelles, suffisante pour justifier une intervention disciplinaire.
Cet arrêt souligne l’absence d’une règle universelle en matière de conflits d’intérêts dans les litiges. Chaque cas doit être évalué individuellement, en tenant compte du risque concret de conflit dans la situation spécifique. Il ne suffit pas de soulever la possibilité d’un conflit d’intérêts pour invalider les actions d’un avocat. Néanmoins, les avocats doivent faire preuve de prudence, car persister dans une situation conflictuelle peut engendrer une situation préjudiciable aussi bien pour eux-mêmes que pour leurs clients.
Ainsi, le TF souligne l’importance de la diligence que les avocats et les instances judiciaires doivent observer pour éviter les situations de confit d’intérêts.
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